Résumé
Nul ne conteste la place et le rôle tenus par la chanson populaire en Bretagne bretonnante jusqu’à une période relativement proche de la nôtre. Pendant longtemps, confiée pour ainsi dire exclusivement à la mémoire, elle a été transmise de bouche à oreille parfois sur de très longues durées. La présente étude est basée sur une collecte de trois gwerzioù inédites, effectuée en Trégor par deux de nos plus grands folkloristes, François-Marie Luzel (1821-1895) et Anatole Le Braz (1859-1926).
Le sujet de ces chants à caractère tragique est ici le même dans les trois cas. Il s’agit de la vie et de la mort de trois prêtres au XVIIIe siècle dans trois paroisses différentes, deux maritimes, Trébeurden et Trégastel, et une rurale, Plounévez-Moëdec. La comparaison de ces chants avec leurs variantes est intéressante à divers titres. Elle permet d’une part d’observer les mécanismes de la tradition orale. D’autre part, les éléments tels que, par exemple, les noms de lieux ou ceux des personnages impliqués dans les histoires qu’ils racontent, croisés avec des documents officiels, rendent possible, non seulement de reconstituer et de dater les faits relatés, mais aussi d’établir leur degré de véracité. Ils renseignent enfin sur les rapports sociaux que la noblesse et les gens du peuple entretenaient avec le clergé. En un mot, ces gwerzioù font mieux connaître des petits événements de toute nature relatifs à la vie des villages qui, sans elles et leurs transmetteurs, auraient aujourd’hui sombré dans l’oubli. [résumé de la revue]